À l'observation, on peut constater que certains ensembles humains - ou animaux - sont en mesure de tirer un meilleur parti de leur environnement, par exemple d'être plus inventifs ou plus efficaces ou efficients lorsqu'il s'agit de prendre des décisions.
Pour explorer les fondations de l'intelligence collective, une nouvelle approche fondée sur le Big Data est née : la physique sociale. (Social Physics) Telle est le nom que lui a donné son principal artisan, le professeur Alex 'Sandy' Pentland du MIT Media Lab. Par exemple, Sandy étudie, comme un épidémiologiste, comment les idées, bonnes ou mauvaises, circulent dans les populations. Son approche, fondée sur l'analyse des grands-ensembles de données, se démarque de celles utilisées par les autres chercheurs de l'intelligence collective, lesquels travaillent habituellement sur des petits groupes de personnes et qui ne capturent que certaines des interactions que les participants entretiennent avec leur environnement.
Les nouvelles technologies de l'information permettent aujourd'hui de suivre ce que font, lisent, expriment ou achètent des milliers de personnes qui de manière anonyme et avec leur consentement acceptent de voir leurs données enregistrées par l'équipe de Sandy. Cette méthode livre déjà ses premiers résultats. Ainsi, une équipe a cherché à mesurer la performance d'investisseurs sur un marché selon leur localisation dans les flux d'informations. Schématiquement, il existe trois types de comportements. Certains opérateurs sont isolés. Ils reçoivent peu d'information et font circuler peu d'information. D'autres reçoivent et proposent beaucoup d'informations aux membres de leur réseau. Mais, même si celui-ci est grand (par le nombre des participants) et dense (par l'intensité des échanges) il n'est pas forcément diversifié (ouvert aux contributions des personnes qui tout en étant connectées avec ce groupe sont à l'extérieur). Entre ces deux extrêmes, on trouve des groupes de personnes qui échangent des informations de manière modérée. Ce réseau est moins dense, plus ouvert et les contributions sont plus diversifiées.
Quelles sont les performances sur les marchés de ces différents groupes ? Elles sont substantiellement différentes. L'équipe de Sandy note une différence moyenne de 30% entre les individus du groupe le moins performant et ceux dans le groupe le plus performant. Les opérateurs isolés semblent les moins performants. Ils reçoivent insuffisamment d'information. Les opérateurs appartenant au réseau le plus dense sont également bien moins performants que ce que leur niveau d'information pourrait le laisser penser. Sandy évoque ce groupe sous le terme de chambre d'écho. Ce concept est proche de celui employé autrefois par le Premier ministre Raymond Barre qui parlait de microcosme (politique). Ces travaux récents montrent que ce qui caractérise le microcosme ce n'est pas sa taille : les chambres d'écho sont constituées par de très nombreux participants. Mais, si leurs discours sont repris massivement, ils ne sont point analysés, évalués ou critiqués suffisamment. La répétition d'une information ne change pas sa qualité. La multiplicité des sources est, dans le cas des chambres d'écho, réduite.
Ces travaux démontrent combien les effets de groupe peuvent affecter la performance du groupe. Les théoriciens de l'information et les scientifiques nous rappellent qu'il est important pour éclairer les décisions de rechercher des informations susceptibles de réfuter nos hypothèses et de changer le cours de nos décisions. Méfiez-vous des chambres d'écho ! Il est préférable de se positionner dans le troisième groupe, nous apprennent les travaux du professeur Pentland.
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