lundi 10 octobre 2011

Mythologies peri-alimentaires (1)

C’est en 1957 que Roland Barthes publie Mythologies, un ensemble de textes écrits entre 1954 et 1956. Comme l’auteur le dit dans sa préface de 1970, il poursuit à l’époque deux objectifs :


« … d’une part une critique idéologique portant sur le langage de la culture de masse ; d’autre part un premier démontage sémiologique de ce langage : je venais de lire Saussure et j’en retirai la conviction qu’en traitant des « représentations collectives » comme des systèmes de signes on pouvait espérer sortir de la dénonciation pieuse et rendre compte en détail de la mystification qui transforme la culture petite-bourgeoise en nature universelle. »


Notre projet est ici moins ambitieux que celui de Roland Barthes. Il ne s’agit pas de dénoncer mais de bien comprendre quels pourraient être les bénéfices, mais aussi les risques de la mise en récit de la marque. Nous focaliserons notre attention sur les marques alimentaires. Nous tenterons de décortiquer leurs publicités, lorsqu’elles s’expriment sous une forme de récit. Attacher un récit à la marque (brand story) semble devenir, au moins aux USA, la continuation naturelle de la démarche de construction d’une image (brand image). La marque devient alors récit (mythe) en s’intégrant dans un récit, celui que les publicités nous racontent. Comme c’est le cas dans quelques publicités actuelles, plus particulièrement dans le secteur automobile, la marque fait aujourd’hui de plus en plus souvent des références explicites à son histoire personnelle, ses heures de gloire, sa naissance, etc. Parfois, l’entreprise remet même au goût du jour les produits qui ont fait autrefois sa célébrité (par exemple, Fiat 500)

Depuis l’antiquité déjà, la valeur des récits (mythologies) n’est plus à justifier : les récits structurent notre vie et celle des peuples. Certains ont vu dans l’effondrement du mur de Berlin la fin de l’histoire, celle au moins des deux grands récits qui ont structurés le 20e siècle : le communisme et le capitalisme. Des philosophes ont même interprété le phénomène Otaku comme autant de tentatives individuelles et collectives de recréer les récits qui nous font aujourd’hui défaut.

Les deux déterminations exprimées par Roland Barthes dans la citation ci-dessus, nous permettent de mieux comprendre l’utilisation qu’il fait du terme Mythologies pour rendre compte des fausses évidences qu’il cherche à débusquer dans les récits de cette époque. Pour lui, le mythe tout entier est un message. Et tout, ou presque tout, peut alors devenir Mythe. Comme tout message, il peut être décortiqué et analysé à l’aide de la sémiologie. Cependant le mythe n’est pas un message simple, un message primaire. C’est plutôt une combinaison, un assemblage de messages primaires, lesquels s’ils sont bien interprétés dans un récit peuvent voir leurs effets se décupler.

Après une courte définition du Mythe et des mécanismes impacts, nous présenterons dans un premier temps de manière sommaire quelques uns des « décryptages » que Roland Barthes produisit à l’époque sur le vin, le lait, le bifteck et les frites, puis nous tenterons dans un second temps de réaliser ce dur exercice à partir de quelques publicités alimentaires et non alimentaires contemporaines. Cependant, nous focaliserons notre regard sur le récit mais pas sur le produit. C’est pour cette raison que ce carnet s’intitule Mythologies péri-alimentaires, en ce sens que les composantes étudiées pourraient très probablement s’appliquer à un grand nombre de marques ou de produit si tel était le souhait des entreprises.

(A suivre ...)

Faites nous part de vos mythiques histoires alimentaires.

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