jeudi 10 janvier 2013

Changement climatique : quelques pistes pour en atténuer les effets sur la production agricole !

L'article du Financial Times du 3 janvier sur l'estimation des coûts associés au changement climatique de Louise Lucas m'a particulièrement interpellé.

D'après la Nationale Farmers' Union, c'est une perte de plus de 1.3 milliard de livres sterling (1,5 milliard d'€) que les évènements extrêmes, imputables au changement climatique, ont causé à l'agriculture anglaise. Ainsi, le rendement du blé a été de 15 % plus faible que celui de la moyenne des cinq dernières années ; celui de la pomme de terre a été égal à 75 % de celui de l'année 2011 et le plus bas depuis 1976. La Grande-Bretagne est devenue un importateur net de blé, un évènement rare depuis de nombreuses années.

Alors que l'on discute les contours d'une nouvelle politique agriculture commune, il me parait judicieux de suggérer à nos représentants de favoriser la mise en oeuvre de dispositifs permettant d'atténuer les effets du changement climatique sur la production agricole. Rappelons que le changement climatique est caractérisé par une évolution lente des moyennes (par exemple une augmentation de la température moyenne), mais surtout par un accroissement de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes (lire mon billet à ce sujet).




Il existe plusieurs moyens pour atténuer les effets du changement climatique. Alors qu'il est difficile d'envisager de changer le climat dans le court terme, c'est contre ses effets qu'il faut se protéger.

La première démarche consiste à favoriser une agriculture moins sensible au climat. Pour certaines productions, une migration vers une agriculture en environnement totalement (ou partiellement) contrôlé peut être envisagée. Mais ce n'est pas le cas pour les grandes cultures que l'on ne peut mettre sous serre qu'avec un coût exorbitant (sauf à inventer de nouvelles technologies ou bien démultiplier la productivité). Pour celle-ci, l’hétérospécificité des choix culturaux peut offrir une possibilité d'assurance contre des pertes de production importantes.

L'hétérospécificité des choix culturaux est une démarche qui consiste à optimiser les choix des cultures et des variétés compte tenu de la typologie des sols et de l'anticipation que l'on forme sur la distribution des évènements climatiques dans une région. Il n'y a là rien de nouveau. Mais alors que l'optimisation est habituellement réalisée pour obtenir le rendement moyen (que l'on prend seul en considération) le plus élevé pour une exploitation. Lorsque le risque est d'amplitude et de fréquence faibles, on peut faire abstraction de sa variation. Mais lorsque le risque est important en amplitude et en fréquence, on ne peut plus ne pas le prendre en compte. La démarche habituelle est altérée sur deux aspects :
  1. En premier lieu, on prend en compte le rendement moyen ET sa variation imputable au changement climatique. La technique mise en oeuvre ici n'est substantiellement pas différente de l'approche proposée par Harry Markowitz, prix Nobel d'économie en 1990, pour la gestion des portefeuilles financiers composés de produits financiers.
  2. En second lieu, le modèle prend en compte l'intérêt de l'association entre des agriculteurs exposer de manière différente au risque climatique. La nature de la différence d'exposition est ici un critère important pour le succès de la mitigation des risques.
Comme cette technique n'est pas encore déployée, il est difficile d'obtenir des données de terrain. Cependant, le recours à des simulations souligne l'intérêt de l'hétérospécificité des choix culturaux. Pour en savoir plus sur cette technique lire un article sur ce sujet (suivre ce lien).

L'agroforestry, association entre les cultures agricoles et la production de bois, présente également des pistes intéressantes d'atténuation des effets climatiques.

Finalement, on peut toujours suggérer de compenser les pertes imputables aux évènements extrêmes. Cette solution apparaît la plus facile à mettre en oeuvre, mais elle présente quelques problèmes. Il est concevable de mettre en oeuvre une politique s'il y a redistribution entre la production et la consommation. Les politiques agricoles qui favorisent la production permettent aux consommateurs de bénéficier de prix bas. Il s'agit d'un gain pour le consommateur. Il n'apparaît pas injuste de récompenser l'agriculture sous la forme de subvention.

Dans le cas de pertes de production imputables au changement climatique, le prix à la consommation augmente. Le consommateur comme l'agriculteur sont pénalisés. Les gains de l'un ne peuvent compenser le manque à gagner de l'autre, puis les effets sont négatifs sur les uns comme sur les autres.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les carnets du blog les plus consultés

Membres