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vendredi 4 août 2017

Acidification des Océans : quels effets sur le comportement des poissons ?

LOST AT SEA ! Tel est le titre de l'article publié en Juin 2017 dans le magazine Scientific American par Danielle L. Dixson, professeur de sciences marines. Il témoigne de l'effet probable de l'acidification des océans sur le comportement des poissons et en fin de compte sur leur comportement et leur survie. Le comportement des poissons, par exemple leur aptitude à se réfugier dans un récif ou un herbier pour éviter les prédateurs ou bien encore leur capacité à sentir les effluves d'une proie sont des dimensions critiques de leur survie dans leur milieu.

Sans les océans qui absorbent 30 à 40 du CO2 atmosphérique, l'accroissement de ce gaz à effet de serre dans l'atmosphère serait bien plus important. Pour rappel, on estime que la concentration de CO2 dans l'atmosphère est passée de 280 ppm au début de la période d'industrialisation à 400 ppm aujourd'hui.  La capture du CO2 par les océans se traduit par leur acidification. On estime que celle-ci s'est accrue de 150 % pendant la même période.  Si les effets de l'acidification sur les mollusques et le plancton avaient été testés au laboratoire - Ils affectent le développement des espèces, la grande majorité des scientifiques pensaient que les poissons qui disposent de mécanismes de régulation plus sophistiqués seraient en mesure de s'adapter. Les expériences réalisées au laboratoire avec différents niveaux d'acidification montrent que ce n'est pas le cas. 


Le poissonclown, le très fameux Nemo du studio Walt Disney, es-t un petit poisson qui au stade juvénile migre pendant la nuit afin d'éviter les prédateurs de la pleine mer vers les récifs où il trouvera un abri dans une anémone. Pour trouver son chemin dans l'obscurité, il dépend de la qualité de son ouïe. Les récifs et leurs habitants produisent des sons qui guident les poissons clowns vers des zones où ils trouvent leurs refuges.

Lorsque les chercheurs testent, en journée, les effets des sons des récifs, les juvéniles, les poissons s'éloignent de la source sonore. C'est ce comportement qui leur permet d'éviter les prédateurs qui sont actifs pendant la journée en bordure des récifs. Par contre lorsqu'ils ont soumis des juvéniles élevés pendant leur courte vie dans une eau 60% plus acide (le taux d'acide probable en 2030),  ils ont observé que presque 50% des juvéniles étaient attiré par les sons. Ils ont répété cette expérience avec différents niveaux d'acidité est observé des phénomènes similaires. Si la vie des poissons n'est pas directement affectée, leur capacité à capturer les signaux de leur environnement et leur comportement sont modifiés. 

Danielle L. Dixon a réalisé d'autres expériences. Par exemple, elle s'est intéressée à estimer l'effet de l'acidification sur l'odorat des prédateurs. L'odeur des proies attire les poissons prédateurs ou des requins. Ils ont découvert aux laboratoires que des requins perdaient leur intérêt pour les effluves d'une proie lorsque l'acidité augmentait, et lorsque celle-ci était trop élevée la même odeur avait une caractéristique répulsive.

Conclusions : le comportement des proies et celui des prédateurs risque d'être profondément altéré par l'acidification des océans. Les effets pourraient être dévastateurs. Cependant, ces tests ne permettent pas d'explorer les capacités d'adaptation du comportement des populations de poissons lorsque l'acidification s'accroit de manière faible mais continue sur une longue période. Espérons !



lundi 23 novembre 2015

Les différentes identités des consommateurs

Il y a quelques jours, le Dr Frank Chmitelin et les équipes d'Adisseo m'ont offert l'opportunité de m'adresser à plus de 150 spécialistes de l'alimentation animale, venant de plus de 30 pays, et réunis à Paris pour l'édition 2015 d'Adisseo Expertise Tour. Ils m'avaient proposé d'explorer, pour leurs invités, l'attitude des consommateurs à l'égard des démarches environnementales mises en oeuvre par les professionnels des filières animales.

Voici quelques éléments de mon allocution.

Les consommateurs contemporains sont pluriels et particulièrement difficiles à décrypter. Les résultats des enquêtes réalisées auprès des consommateurs sont souvent en contradiction avec l'observation de leurs comportements. Le consommateur dit une chose, mais il en fait souvent une autre. Cependant, le consommateur n'est pas pour autant un menteur. Les approches plus qualitatives montrent que les consommateurs sont  en fait composés de multiples identités, souvent très différentes. Le consommateur est tout à la fois un acheteur, un cuisinier, un employé, un parent, un mangeur, un citoyen, etc. L'identité active ou les identités actives, à un moment donné, dépendent du contexte. Interrogé dans les rayons d'une grande surface, c'est l'identité acheteur qui parlera. Dans le rayon viande, l'identité acheteur se demandera quels légumes servir avec la pièce de viande en main, si le prix n'est pas trop élevé, si les enfants aimeront, etc. Interrogé par un journaliste sur un trottoir, c'est possiblement l'identité citoyen qui prendra le relais. Les identités ne forment pas un ensemble cohérent. C'est pourquoi il n'est pas rare de constater que les comportements ne correspondent pas toujours aux opinions et que parfois les deux sont en contradiction.

Une identité est habituellement activée dans un contexte spécifique. Des recherches récentes montrent qu'il est relativement facile d'activer une identité plutôt qu'une autre. Les chercheurs de l'Université de Lancaster ont ainsi réalisé une expérience très intéressante. Dans un premier temps, ils ont activé chez les sujets participant à leur expérience soit l'identité "Supporter de Manchester United" soit celle "Amateur de Football."  Dans un second temps, ils ont observé le comportement des sujets. Ceux-ci avaient l'opportunité d'apporter leur aide à une personne faisant une chute dans un escalier. Celle-ci portait soit un polo aux couleurs de Manchester United, soit aux couleurs de Liverpool soit un polo neutre. Les deux identités ont réagi de manière différente dans les trois contextes proposés.  

Ces multiples identités coexistent bien la plupart du temps. Disons plutôt que les identités inutiles dans un contexte particulier s'effacent pour faire place à l'identité la plus utile à ce moment - là. Les sciences cognitives expliquent à la perfection ce phénomène. Dans un contexte donné, notre attention est focalisée sur la bonne réalisation d'une tâche. J'aime particulièrement l'expression : pré-occupé. Nos pensées sont accaparées par la tâche que l'on se propose de réaliser. Nous sommes alors particulièrement attentifs à certaines informations, celles qui nous permettront de réaliser notre dessein du moment avec succès.

Ce phénomène n'est pas récent, mais il est à mon avis exacerbé par la diversité des informations qui nous sont transmises, les incertitudes qu'elles révèlent, la multiplicité des contextes dans lesquels l'homme moderne évolue, etc. Notre cerveau est saturé en permanence d'informations, d'injonctions et de conseils. Il n'est malheureusement pas doté d'une capacité suffisante pour prendre en considération l'ensemble des paramètres de l'équation que son propriétaire pourrait prendre lorsqu'il achète une belle côte de boeuf. Certaines des identités sont dans ces contextes-là mises en sommeil, d'autres, quant à elles, sont particulièrement actives. Autrement dit, lorsque l'on achète un beau morceau de boeuf, il est fort improbable que l'acheteur prenne en considération les différentes dimensions environnementales de la production de cette viande, les conditions d'abattages, le travail de l'éleveur, etc. Dans ce micro - moment, l'acheteur pense date limite de consommation, recette de cuisine, prix, faire plaisir aux convives, etc.  

Il y a d’autres moments où une autre identité, par exemple l'identité citoyenne, prend le contrôle des opérations. L'individu se trouve en situation de dissonance, par exemple, lorsque les achats réalisés sous le contrôle de l'identité acheteur ne sont pas en adéquation avec les valeurs de l'identité citoyenne. Les produits de cette dissonance sont habituellement des émotions négatives ou tout du moins un certain inconfort émotionnel. L’identité santé reprochera à l’identité mangeur l’abondance d’un repas. De cette tension peut naitre un inconfort, un sentiment de culpabilité. Les individus cherchent le plus souvent à éviter cet inconfort en reléguant l'une des identités dans l'obscurité ou en mettant en conformité leur comportement ou bien encore en niant l'existence des faits qui font contradiction. 

Une entreprise aurait donc toujours intérêt à apaiser l'inconfort qui résulte de ces dissonances cognitives en proposant des produits qui sont en conformité avec les attentes de nos différentes personnalités. Des produits plus respectueux de l'environnement ou made in local parleront au citoyen en nous tout en satisfaisant le mangeur. Cette condition, bien que nécessaire, me semble cependant insuffisante. Il faudrait encore que nous soyons, alors que notre esprit est, dans les micro-moments, attentif à des indices essentiels à nos choix qu'il le soit également à des informations qui sont essentielles pour les autres identités. 


lundi 2 décembre 2013

Des consommateurs plus conso-acteurs avant les fêtes de fin d'année ?

A la veille des fêtes de fin d'année, une nouvelle étude de BBMG, GlobeScan et SustainAbility constate que les consommateurs de 6 grands pays repense leur consommation avec la durabilité en tête. Slideshare ci-dessous en anglais


lundi 21 janvier 2013

PsychoFood 2 : Monsieur le Juge, mon client a des circonstances...

Dans ce billet, je fais suite au premier billet de la série PsychoFood. Dans un premier billet, je présentais les travaux d'Alexander Chernev sur un biais d'estimation des calories (Dieter's Paradox) dont nous sommes tous susceptibles d'être victime. Une manière d'explorer l'alimentation, de la fourche à la fourchette, c'est de s'interroger sur la relation entre psychologie et alimentation . J'ai l'intuition qu'il y là de belles découvertes à partager. Ce second billet de la série met en relation le régime alimentaire et le comportement agressif.

Depuis de nombreuses années, les chercheurs se sont posé la question de l'origine de l'agressivité, de la criminalité, etc. Toutes les disciplines se sont attachées à apporter des réponses à ces questions. C'est aussi le cas de la nutrition !

Ainsi Béatrice Golomb, professeur de médecine à l'U.C. San Diègo, s'est demandé quels rôles pourraient jouer les acides gras trans sur le comportement. Le terme trans et le terme cis caractérise les deux formes géométriques qu'un même acide gras peut prendre dans l'espace. Les trans sont plutôt rectilignes alors que les cis sont plutôt courbés. Cette forme leur confère des propriétés, par exemple physique : la température de fusion des trans est plus élevé que celle des cis. On sait par ailleurs, les effets que les acides gras trans peuvent avoir sur la bonne santé cardiaque et vasculaire.

Béatrice Golomb a tenté de mettre en relation la consommation d'acides gras trans avec le comportement chez plus de 1 000 personnes. Des recherches avaient déjà montré que la synthèse dans le corps du DHA, une molécule avec un effet calmant et antidépressant, était perturbée par les acides gras trans. Les personnes qui ont participé à l'étude Béatrice Golomb ont, d'un côté, été interrogées sur leur alimentation et, d'un autre côté, les chercheurs ont apprécié leur degré d'impatience, leur irritabilité, leur agressivité, etc.

Après avoir considéré d'autres facteurs, les chercheurs de l'équipe de B. Golomb ont abouti à la conclusion que la consommation des acides gras trans est, probablement, l'un des meilleurs déterminants de l'agressivité. Ce lien est constant quelque soit l'âge, le sexe, l'ethnie ou les caractéristiques socio-économiques.

Est-ce qu'il existe une relation de cause à effet ? L'étude ne répond pas à cette question. Une personne naturellement agressive pourrait possiblement avoir un comportement alimentaire particulier. Bien qu'à mon avis cette hypothèse soit difficilement envisageable. Quoique ?

Sommes-nous ce que nous mangeons ? Cette étude semble corroborer, au moins partiellement ce dicton. Demain, peut-être, entendrons-nous dans les prétoires un avocat demander les circonstances atténuantes parce qu'alimentation de son client est trop riche en acide gras trans... et de demander également des dommages aux entreprises agro-alimentaires dont les produits, consommés par son client, sont riches en trans.

Une affaire à suivre !


Dans la série PsychoFood, lire et relire

      

        

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