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lundi 5 septembre 2016

Négociation dans les filières agroalimentaires - un peu de théorie ne peut pas faire de mal !

Depuis quelques années, l'observation du fonctionnement des filières agroalimentaires, en France comme à l'étranger, m'inspire quelques pensées. J'ai parfois l'impression que l'on cherche en France en permanence à y défier les règles élémentaires de l'économie. Comme si on imaginait possible, en physique, qu'un ballon de foot envoyé d'un coup de pied dans les airs puisse ne jamais retomber à terre. Impossible ! Sauf probablement dans des conditions gravitationnelles particulières. 

En économie, l'économie industrielle s'intéresse aux interactions entre les acteurs économiques et, plus particulièrement, aux interactions entre les entreprises. Par exemple, elle s'intéresse à la compétition ou bien encore aux relations verticales (celles entre les clients et les fournisseurs). Les chercheurs ont travaillé pour déterminer, dans des contextes typiques, les stratégies que les entreprises devraient mettre en oeuvre pour maximiser leur performance économique. Mais, la performance économique d'une entreprise, petite ou grande, dépend des décisions qui seront prises par les autres entreprises. Les décisions d'une petite entreprise, par exemple celles d’un producteur laitier, n'affecteront pas ou bien très peu les décisions des autres entreprises. Les petites entreprises doivent s'adapter aux conditions du marché. Dans les autres cas, les décisions de l'un des acteurs affectent les décisions des autres et réciproquement. On peut schématiquement placer ces contextes dans deux (trois) classes : les contextes conflictuels et les contextes coopératifs (3. les contextes neutres). 

Cette démarche de classification est équivalente en substance à celle des biologistes / écologistes.  Ils classent également les interactions, mais celles entre les espèces / entités, selon les effets du rapprochement de deux entités. Les types sont : la compétition, la prédation / le parasitisme, le commensalisme, l'amensalisme, le neutralisme,  la symbiose / le mutualisme. Par exemple, si le rapprochement de A et de B produit un effet positif sur A et sur B, il s'agit d'une relation symbiotique. Si le rapprochement de A et de B est négatif sur A comme sur B, on parlera de compétition. Gilles Boeuf, dans ses leçons au Collège de France, présente la biodiversité comme l'ensemble des interactions entre les espèces vivantes, entre elles, et également avec leur environnement physique.    


Le pouvoir d'exclure, premier paramètre de la négociation :

Si A à intérêt à exiger un prix plus faible (A est par exemple un client), il est intéressant de s'interroger sur le degré de dépendance de A et B lorsque ces deux entités cherchent à obtenir un niveau de performance économique (ou pour exister). Si A dépend de B et réciproquement, un accord pourra être trouvé entre A et B. Chacun y a intérêt. 

Par contre, si B dépend de A, mais A ne dépend pas de B, alors A peut exclure B sans conséquence pour lui. B (qui dépend de A) devra accepter les conditions de A (le prix proposé par A) sous peine d'être exclu par A du marché. A possède les moyens (l'exclusion) pour satisfaire ses intérêts (obtenir une baisse de prix).  Dans la relation entre les producteurs de lait et une entreprise comme Lactalis, l'entreprise est en position de force, car elle peut exclure un producteur sans en subir les conséquences. Cependant, cette position de force peut être altérée si les producteurs s'associent et si leur union est seule habilitée à négocier. 

Des intérêts divergents, une négociation en échec :

Si les producteurs de lait et Lactalis ne négocient que sur le prix, la négociation est vouée à l'échec. En effet, les intérêts des producteurs et ceux de leur client sont divergents. Le contexte est conflictuel. En effet, l'option qui favorise les intérêts des uns (un prix plus élevé) est défavorable à l'autre et réciproquement. Lorsque j'écris que la négociation est vouée à l'échec, j'exprime la faiblesse de sa stabilité. A la moindre occasion, elle sera remise en question. La négociation est, dans mon esprit, un processus dont l'aboutissement est un accord. Si l'accord est dénoncé dès que la négociation terminée, c'est que la négociation a échoué. Si une des parties quitte la table insatisfaite, la négociation a échoué. 

Dans un contexte conflictuel, la négociation est vouée à l'échec. Celui qui a le pouvoir impose ses conditions. Si le pouvoir est équilibré, les termes de l'accord seront remis en question à la moindre occasion. Négocier avec succès dans un contexte conflictuel, c'est comme penser qu'un ballon de foot envoyé d'un coup de pied dans les airs peut ne jamais retomber à terre. Il faut le relancer en permanence pour qu'il soit dans les airs. 

Faire converger les intérêts :

Un contexte conflictuel est caractérisé par un intérêt conflictuel. Dans une relation verticale, le prix de l'échange est toujours associé à un intérêt conflictuel. Pour que la négociation soit un succès, il est nécessaire de transformer un contexte conflictuel en un contexte coopératif. On parle aussi de Win-Win. Il n'y a d'accords gagnant-gagnant que dans des situations de coopération. Une telle situation est décrite comme suit :

Si l'entreprise A possède un intérêt mettre en oeuvre à l'action a et si cette action a bénéficie aussi à l'entreprise B
et 
Si l'entreprise B possède un intérêt à mettre en oeuvre l'action b et si cette action b bénéficie aussi à l'entreprise A

Alors le contexte est coopératif (pour les actions a et b).

Le lecteur notera que les intérêts de A et de B sont convergents. 

Transformer un contexte conflictuel en relation coopérative est plus bien facile à dire qu'à faire. Cela est d'autant plus difficile à réaliser que le prix est toujours une dimension conflictuelle. Pour sortir de cette situation, il faut être en mesure d'élargir la négociation à d'autres dimensions, d'autres types d'actions. Celles-ci doivent impérativement être de nature coopérative. Il est essentiel que les dimensions coopératives pèsent plus dans l'ensemble des relations entre les parties que les dimensions conflictuelles. Les intérêts en commun doivent être plus importants que les intérêts divergents.

Introduisons un instant, dans l'équation économique le volume et supposons que les coûts de production soient constants en fonction du volume produit. Supposons également un instant que les marges soient positives pour les clients comme pour les fournisseurs. 

Dans ce cas, les clients comme les fournisseurs ont intérêt à augmenter les volumes. Chaque unité supplémentaire apporte une marge positive. Le client possède donc un intérêt grandir et à faire grandir ses fournisseurs et les fournisseurs à grandir et à faire grandir leur client. S'il existe des économies d'échelle d'un côté comme de l'autre, alors la croissance des volumes s'accompagne également de la croissance des marges (pour un même prix d'échange). Un aspect positif pour les uns comme pour les autres. Les clients comme les fournisseurs sont alors dans une situation gagnant-gagnant. 

En ajoutant une dimension supplémentaire dans l'équation de la négociation, alors on peut possiblement transformer une situation d'échec en situation gagnante.  Il existe d'autres possibilités que le volume pour aligner les intérêts des deux parties. Mais, c'est, me semble-t-il, la trajectoire que certaines filières ont empruntée à l'étranger. Dans les petits pays du nord de l'Europe, où la croissance de la consommation est faible, les filières se sont organisées pour partir à l'assaut des marchés étrangers en croissance.

Aujourd'hui et demain :

Vous trouverez dans ce blog plusieurs billets qui mettent en perspective les choix présents en regard de leur effet futur. Pour faire simple, dans la nature un parasite n'a jamais intérêt à ce que les espèces hôtes périssent. Un parasite doit donc être très soucieux de l'intensité de sa relation avec ses hôtes. Si les hôtes sont trop exploités par un parasite et s'ils meurent, le parasite également. Pour que le parasite soit en mesure de se développer, l'hôte doit garder sa vigueur et se développer également. Des prix trop faibles sont préjudiciables aux fournisseurs et peuvent mettre en danger sa vie, et celle du système économique dans son ensemble. Dans le milieu agroalimentaire, le terme de prix juste est souvent évoqué. Un prix qui permet à chacun de prospérer. Ce concept est cependant disputé par les protagonistes du marché. Leur doctrine est Darwienne. Le marché fait le prix. Seuls ceux capables de s'adapter aux conditions du marché survivent et ils prospèrent sur la dépouille des autres. Je ne partage pas totalement cette vision, car elle réduit le système économique à un simple marché unique. Le marché n'est plus unique. Le localisme tente de fragmenter le marché en de multiples marchés locaux. Le système n'est pas composé d'un marché. Les salariés des fournisseurs sont les clients des clients.   

L'environnement de la relation, un facteur clef :

Est-il possible d'élargir les dimensions de la négociation ? J'ai évoqué une stratégie de croissance par les volumes. Elle n'est pas toujours possible. Cela dépend des opportunités du marché. Par ailleurs, on doit s'interroger sur l'ensemble des relations qui fondent un écosystème. Les producteurs laitiers et les transformateurs ne sont pas les seules parties prenantes de cet écosystème. D'autres entités opèrent comme les pouvoirs publics ou bien encore les distributeurs. Les pouvoirs publics ne sont pas des simples régulateurs des relations entre producteurs et distributeurs, ils sont aussi des acteurs qui interviennent par le biais de taxes, impôts et réglementations, plus ou moins contraignantes. Ils peuvent ajouter des dimensions à la négociation. Pour que celle-ci fonctionne, il faut que ces dimensions soient coopératives.

Que faut-il retenir ?

1. Il est difficile, voire impossible, de négocier avec succès dans un contexte conflictuel. Le pouvoir de négociation est le paramètre clef.

2. En ajoutant des dimensions coopératives, il est envisageable de transformer un contexte conflictuel en un contexte globalement coopératif. Si ce n'est pas le cas, celui qui a le pouvoir d'exclure les autres acteurs du jeu est en situation de force dans un contexte conflictuel pour extraire la valeur. La négociation est durablement vouée à l'échec. 

3. Les actions des acteurs en situation de force peuvent leur être préjudiciables dans le long terme, si elles ne sont pas bien dosées.

  



   

  

     

     

vendredi 10 mai 2013

Des poules pour réduire votre facture !

Vous disposez d'un jardin... et bien votre service d'enlèvement des déchets ménagers pourrait bien vous suggérer d'adopter une couple de poules pour réduire votre TEOM (taxe d'enlèvement des ordures ménagères). Depuis 2011, les communes peuvent instaurer à titre expérimental pendant cinq ans sur tout ou partie de leur territoire une part variable dans le montant de la taxe. Elle peut être calculée en fonction du poids, du volume des déchets, ou sur une autre formule. L'objectif est, à terme, d'appliquer le respect du principe du pollueur - payeur. Cependant, une partie des déchets ménagers peut être valorisée par différentes voies sous différentes formes : énergie, compost, etc. Les poules offrent une alternative intéressante que le service de collecte des déchets de Bayeux a proposée aux habitants. Voir le reportage vidéo de TF1 ci-dessous. 


Les poules produisent des œufs ; elles participent au débroussaillage du jardin ; et maintenant elles permettent aussi de faire des économies sur la collecte et le traitement des déchets ménagers !

Voir également sur ce blog un billet sur l'usage des poules dans un environnement urbain ou scolaire.

lundi 6 mai 2013

La géostatistique au service de l'agriculture - Quels bénéfices espérer ?

La géostatistique a été inventée en France, dans les années 1960, par Georges Matheron, mathématicien et géologue, pour mieux apprécier l'évolution de la richesse en minerai d'une roche dans l'espace. C'est à partir d'échantillons réalisés par prélèvements en différentes localisations que Matheron a formulé son approche géostatistique. Cependant, l'idée même de géostatistique est plus ancienne dans le domaine scientifique. Dans les années 1910, les recherches agricoles mentionnaient des disparités de production entre certaines localisations sur un champ. La disparité entre deux parcelles était une fonction de leur distance dans l'espace. Elle était souvent d'une amplitude moindre entre deux parcelles proches et d'une amplitude plus grande entre deux parcelles éloignées. Cependant, ces observations n'avaient pas débouché sur une conceptualisation telle que celle proposée 50 ans plus tard.

En géostatistique, la propriété d'un lieu x, par exemple la teneur en azote d'un sol, est considérée comme une variable aléatoire G(x). Lorsque la distance entre deux lieux est faible, alors G(x1) et G(x2) sont fortement corrélées. Les spécialistes utilisent cette propriété pour effectuer un nombre limité de mesures sur un champ tout en conservant une estimation de la propriété en un lieu donné de grande qualité. À l'aide de la statistique, des interpolations sont proposées. Elles permettent d'élaborer des cartes, telle celle proposée ci-contre (issue d'une étude de Bellotti, Capra, Sarocchi et D'antonio sur les dépôts volcaniques).

On comprend l'intérêt des géostatistiques pour l'agriculture de précision. Elles permettent d'affiner la pratique culturale et de réduire aux stricts nécessaires les apports en engrais, eau et autres traitements. Les géostatistiques devraient permettre donc d'optimiser les dépenses. Elles devraient également jouer un rôle important dans la prévention des « pollutions » agricoles en permettant d'apporter uniquement les quantités utiles à la culture. Il s'agit des conclusions auxquelles Margaret A. Oliver, spécialiste des sols et en agriculture de précision, est parvenue dans un article publié dans le journal Significance le 24 avril 2013.  
   


samedi 22 décembre 2012

Xerfi - L'agroalimentaire une citadelle assiégée ?

"Excédent commercial record, production en hausse, perspectives d’activité positives. Non, il ne s’agit pas de l’industrie automobile allemande, mais bel et bien des industries agroalimentaires en France, les IAA..." Alexandre Mirlicourtois, directeur des études de Xerfi nous parle de la conjoncture des IAA.



mercredi 31 août 2011

Des robots abeilles bientôt sur le marché ?

Albert Einstein prédisait, parait-il, une fin rapide de la vie sur terre si les abeilles venaient à disparaître. Sa prédiction va-t-elle se réaliser ? Cette prédiction et l'augmentation de la prévalence du syndrome d'effondrement des colonies au cours de la dernière décennie peuvent nous laisser penser que l'avenir de la planète terre ne se présente pas sous de très bons auspices. Plusieurs initiatives ont été prises pour nous assurer un avenir plus optimiste. Certaines visent à mieux comprendre le syndrome d'effondrement des colonies afin de s'en extraire. D'autres cherchent à mettre en place des solutions de substitution.

Des chercheurs français de l'INRA et du CNRS et leurs collègues allemands de l'UFZ ont estimé que la valeur des services rendus par les abeilles est de l'ordre de 150 milliards d'euros pour l'année 2005. Cette somme représente par ailleurs 9 % de la production agricole alimentaire mondiale. On comprend mieux l'intérêt que pourrait avoir sur le plan économique le développement d'une solution de substitution. C'est ainsi que l’école des sciences appliquées et de l'ingénieur de l'université Harvard aux États-Unis cherche à mettre au point des abeilles robotisées. Le projet ROBOBEES a des objectifs ambitieux qui vont de la pollinisation autonome à la surveillance militaire en passant par l'observation dans des environnements dangereux ou pour la cartographie à très haute résolution.

Les chercheurs de l'université d'Harvard tentent de mimer les abeilles selon trois dimensions :

  • Les caractéristiques physiques,
  • Les aptitudes cognitives,
  • Le comportement et plus particulièrement le comportement collectif. Ce dernier est particulièrement important puisque les performances des abeilles reposent, parait-il, sur la collaboration de tous les membres de la ruche.
Pour en savoir plus :



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