mercredi 27 juin 2012

La réputation : 8 leviers pour améliorer la compétitivité (10) - La légitimité et autres dimensions



En tant que consommateur, ce n'est pas uniquement la qualité « générale » des produits de l'entreprise que nous questionnons ou bien ses méthodes de production. Pour ces deux aspects, l'entreprise est, de fait, considérée comme compétente. Nous pouvons nous interroger sur certaines de ses pratiques, mais aussi sur les opinions qu'elle met en avant dans les médias ou des aspects plus spécifiques de la qualité de ces produits.



J'avais, il y a quelques années, questionné des nutritionnistes ou des médecins sur le rôle que devaient jouer les entreprises agroalimentaires dans l'éducation nutritionnelle des consommateurs. Leurs réponses étaient presque unanimes : les entreprises n'étaient pas qualifiées pour parler de nutrition aux consommateurs ! Elles n'étaient pas légitimes pour parler de nutrition, et cela même si elles comptaient parmi leurs employés des nutritionnistes ou si elles en consultaient. Et le procès d'intention n'était jamais loin (surtout dans le cas où ils considéraient les produits de l'entreprise comme nutritionnellement incorrects).

Au même moment, les organismes internationaux, tels que la FAO et l'OMS, et nationaux enjoignaient les entreprises à participer à une croisade contre l'obésité dont un des volets était justement l'éducation nutritionnelle. Un autre volet consistait à favoriser la pratique sportive, une chose pour laquelle les entreprises agroalimentaires semblaient par contre légitimes, mais qui m’apparaît plus éloigné des compétences intrinsèques des entreprises agroalimentaires.

La légitimité est le droit que l'on confère à une entreprise ou à une personne d'agir sur une chose. Lorsque l'on questionne la légitimité de l'action d'une personne, on se demande de quel droit cette personne-là agit-elle. En a-t-elle les compétences ? C'est parfois la première question que l'on se pose ? En effet, le diplôme confère souvent à son détenteur des prérogatives. Dispose-t-elle d'un quelconque mandat légal ?

La légitimité établit donc une frontière entre les actions que les parties prenantes autorisent spontanément l'entreprise à prendre et celles qui lui sont naturellement interdites ? Elle limite donc le champ d'action des entreprises, mais elle donne du poids aux actions qui sont dans le champ de la légitimité.

J'avais un instant effleuré l'espoir que l'on puisse considérer comme légitimes toutes les actions qui sont susceptibles d'améliorer une situation, quel que soit celui ou celle qui en est l'auteur. Ne doit-on pas juger la qualité des actes et s'interdire de juger, au contraire, la qualité de leur auteur ? Plusieurs fois, j'ai constaté que cela n'était pas le cas. On questionne souvent les intentions de ceux qui se commettent à réaliser une bonne action ! Cela a pour corollaire que la crainte d'un procès d'intention impose aux entreprises, même celles qui ont les meilleures intentions, de s'interdire d'agir pour le bien de la société.

Le lecteur ne saurait sous-estimer le poids des interdits, plus généralement des normes, qu'une société impose souvent à ces membres ou les comportements qu'elle considère comme conformes et qui s'imposent alors souvent à chacun selon leur position (on parle de rôle social) et parfois au-delà. C'est ainsi que, dans l'espace des émotions, chacun se doit d'adopter les attitudes conformes aux attentes collectives (voir l'excellent livre de B. Rimé, Le partage social des émotions). Dans la plupart des situations de partage des émotions, certaines réponses sont considérées comme adéquates alors que d’autres seront perçues comme inappropriées. Ainsi, lors d'un évènement dramatique, montrer du désintérêt vis-à-vis de la souffrance d'autrui ou bien faire des reproches à ceux qui prennent des risques insensés est considéré comme un comportement inadéquat.


On pourra également lire les travaux particulièrement intéressants de Sylviane Giampino et Brigitte Grésy (mai 2012) sur le poids des normes dites masculines sur la vie professionnelle et personnelle d'hommes du monde de l'entreprise.

Vous trouverez ci-dessous les liens vers les autres billets de ce blog sur le thème de la réputation. Ce billet est le 10e publié sur ce thème.

mardi 26 juin 2012

OGM - Nouvelles formes de résistance ?



Les chercheurs de l'Université de l'Arizona ont découvert que les insectes de ravageurs du coton avaient développé de nouvelles formes de résistance aux cotonniers génétiquement modifiées. Ces cotonniers produisent une toxine dérivée du Bacillus Thuringiensis (Bt). Elle possède une activité très spécifique. Elle n'est efficace que sur certains types de ravageurs sans pour autant être toxique vis-à-vis d'autres espèces animales.


Cette toxine a été utilisée dès les années 1930 sous la forme de spray et à partir de la fin des années 1990 sous la forme d'organismes génétiquement modifiés. C'est ainsi que des cotonniers génétiquement modifiés sont maintenant abondamment utilisés dans toutes les grandes zones de production. La proportion des cotonniers génétiquement modifiés est différente cependant dans ces grandes zones de culture.

Il est très fréquent qu'un organisme s'adapte aux effets néfastes d'une molécule chimique et qu'il devienne ainsi résistant. Il s'agit d'un processus d'adaptation commun à toutes les espèces. Les chercheurs s'attendaient donc à ce phénomène et ils avaient identifié les mécanismes de résistance de différents insectes ravageurs du coton dans un environnement de laboratoire. L'objectif est d'avoir toujours "un quart d'heure d'avance" sur les ravageurs.

  Mais cette stratégie a été battue en brèche par la nature. Dans les zones de culture où les cotonniers génétiquement modifiés sont utilisés en abondance relativement à des zones ou ils sont moins utilisés, d'une part le nombre des ravageurs résistants est plus important, mais surtout certaines résistances sont différentes de celles observées au laboratoire. Plus particulièrement les résistances observées dans la nature sont souvent génétiquement dominantes, alors que celles observées au laboratoire sont essentiellement récessives. Les résistances génétiquement dominantes sont beaucoup plus problématiques que les résistances récessives.   Sur le plan génétique, un caractère est dominant s'il suffit que l'organisme possède un seul des deux allèles pour que celui-ci s'exprime. Le caractère est récessif si les deux allèles sont nécessaires. Le problème est pratiquement important essentiellement parce que la technique des refuges n'est pas aussi performante.Cette technique consiste à augmenter la proportion des insectes qui sont sensibles en leur offrant en bordure des champs avec des cotonniers génétiquement modifiés des cotonniers sans Bt. On maintient ainsi avec ces plants de cotonniers non génétiquement modifiés une population d'insectes en proportion plus riche en insectes non résistants. Ces insectes non résistants "diluent génétiquement" alors dans la population totale les insectes résistants. Cette stratégie est efficace lorsque les résistances sont récessives. L'histoire est totalement différente si la résistance est dominante puisque dans cette situation-là un insecte résistant transmettra toujours sa résistance à la totalité de sa descendance. Les cotonniers génétiquement modifiés sont fréquemment utilisés aux USA (75% des cotonniers) et en Chine du Nord (90%). Pour l'instant les insectes résistants sont en nombre insuffisamment élevé pour causer des problèmes.... 

dimanche 24 juin 2012

La réputation : 8 leviers pour améliorer la compétitivité des entreprises - (9) Influencer les actions des concurrents.


Le principe n'est pas récent ! En effet, Sun Tzu (-544, -496) en parle déjà dans son ouvrage l'Art de la guerre. Comment influencer les décisions des généraux des armées ennemies sans combattre et gagner la guerre ? L'un des principes consiste à « brûler les ponts derrière soi » afin de signaler à l'adversaire que, privés des moyens de la retraite puisque les ponts sont détruits, les guerriers combattront jusqu'à la mort. Qui voudrait alors affronter une armée qui n'a d'autre choix que la mort ou la victoire ! Il existe aujourd'hui encore de nombreuses applications de ce principe ou de principes similaires.
  1. La réputation de position : En altérant le terrain (par exemple en brûlant les ponts) ou la configuration de l'entreprise (faible diversification), certaines entreprises apparaissent comme les soldats de Sun Tzu, c'est-à-dire sans autres moyens que de réagir avec violence aux attaques d'un concurrent. Ce fut le cas de Gerber Products Company (spécialiste des produits pour enfants) a longtemps été une entreprise indépendante, considérée comme susceptible de réagir avec force aux attaques des concurrents... qui pendant longtemps ont évité l'engagement.
  2. La réputation construite : Ralston Purina dans le pet food aux USA a la réputation de suivre les baisses de prix de ces concurrents et d'engager une riposte commerciale de grande ampleur... Ce cas est très proche du cas précédent, mais contrairement à celui-ci, Ralston Purina a une longue histoire de ripostes pour le prouver.
  3. La réputation énoncée : citons le cas de 3 M. cette entreprise clamait, il y a quelques années, vouloir dériver 50 % de ses ventes de produits de moins de 3 ans. La chaîne de magasins d'habillement Nordstrom avait l'habitude d'acheter une pleine page dans les gazettes locales pour souhaiter la bienvenue à ses concurrents (We Welcome the New Kid in Town). Un moyen de leur dire qu'il n'y avait pas lieu pour eux de craindre un coup tordu.
Le lecteur se rappellera des billets précédents sur la réputation et ses effets, que celle-ci est avant tout une réponse à une question que l'on se pose lorsque l'on doit faire un choix. Il est étrange de penser que les choix d'un concurrent puissent être affectés par les messages d'une entreprise concurrente qui cherche à influencer son comportement à son propre avantage. Ne s'agit-il pas d'un bluff ? La menace est-elle bien crédible ? Ces questions sont d'une grande importance.
Il convient de faire la différence entre une alerte (Warning) et une menace (ou une promesse) implicite ou explicite. Une alerte signale à une autre entreprise, en général un concurrent, mais parfois un fournisseur ou un client, un mouvement que l'entreprise réalisera de toute manière, parce que c'est dans son intérêt et qu'il n'y a pas d'autres alternatives pour elle. On se retrouve dans la configuration du pont détruit. L'armée n'a pas d'autres possibilités de se battre ou de se soumettre. Cela est une évidence qu'il n'est pas nécessaire de rappeler à l'ennemi. Il suffit de lui laisser voir le pont détruit. Et lorsque la soumission n'est pas culturellement une option... l'ennemi sait à quoi s'attendre. L'alerte consiste donc à rappeler aux forces économiques opposées le choix que l'entreprise suivra, quelles que soient les décisions que celles-ci prendront... À elles alors de prendre les bonnes décisions.
Une menace, contrairement à une alerte, est une action que l'entreprise ne souhaiterait pas prendre sauf si elle y est contrainte par le comportement d'un concurrent. Un parent qui menace un enfant d'une punition substantielle si le comportement de celui-ci n'est pas approprié souffre toujours de devoir appliquer la punition si l'enfant se comporte effectivement mal. L'enfant ne l'ignore pas. Il peut en jouer en se disant qu'il ne sera finalement pas puni. Pour que le comportement inapproprié soit effectivement puni, la punition doit être certaine. Si ... alors ... ! Il existe plusieurs moyens de la rendre certaine. La réputation est un de ces moyens. Si la punition a été appliquée dans 100 % des cas auparavant, alors il y a de fortes chances qu'elle sera encore une fois appliquée. Dans tous les cas, la menace doit être crédible si l'on veut que l'opposant la prenne au sérieux. Dans le domaine des affaires, il n'y a rien de tel pour crédibiliser une menace de l'établir sous la forme d'un contrat. On ne peut alors que l'appliquer puisqu'elle est inscrite dans un contrat.
En voici un exemple : « Si vous trouvez moins cher, ailleurs, je vous rembourse deux fois la différence. » Ce message qui s'adresse aux consommateurs en fait s'adresse aux concurrents. En effet, si le concurrent propose un prix inférieur, alors le consommateur bénéficiera d'un meilleur deal en achetant auprès de l'entreprise qui lui propose de rembourser deux fois la différence et de se faire rembourser effectivement la différence. Cette menace serait couteuse si l'entreprise devait la mettre à exécution. Mais ni elle ni ses concurrents n’ont un intérêt à ce qu'elle soit appliquée.

Ce billet est le 9e billet de la série sur la réputation :

    vendredi 15 juin 2012

    Agriculture Urbaine

    L'AFSIC (Alternative Farming Systems Information Center) du ministère de l'Agriculture des États-Unis estime qu'environ 15 % de la production alimentaire mondiale est maintenant produite dans des zones urbaines ou dans les banlieues. Tous les espaces inutilisés de la ville et de la banlieue peuvent être mis en culture : toiture, friche industrielle, balcons, etc.

    Dans l'imaginaire français, l'agriculture urbaine est l'affaire de quelques « Bobos » en mal de verdure qui font pousser des tomates cerises et du basilic sur le rebord de leur fenêtre de cuisine ou bien il s'agit d'une oeuvre à vocation sociale. Ce n'est pas le cas ailleurs où l'on recherche les moyens d’intégrer judicieusement d'une agriculture moderne et productive dans la ville et l'immeuble.

    Le cabinet Mithun de Seattle a conçu une ferme verticale intelligente et intégrée, neutre en eau et positive en énergie. (voir ci-dessous)

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