mardi 29 janvier 2013

PsychoFood 3 - La pêche ça donne la pêche !

Une manière d'explorer l'alimentation, de la fourche à la fourchette, c'est de s'interroger sur la relation entre psychologie et alimentation. J'ai l'intuition qu'il y là de belles découvertes à partager. Ce troisième billet de la série met en relation le régime alimentaire et les émotions.

Manger plus de fruits et légumes peut rendre les jeunes plus calmes, plus heureux et plus énergiques dans leur vie quotidienne. Ce sont les résultats d'une nouvelle étude de l'Université d'Otago, en Nouvelle Zélande. Le Dr Conner Tamlin, chercheur dans le département de psychologie, et le Dr Caroline Horwath et Bonnie White du département de nutrition humaine, ont étudié quotidiennement la relation entre les émotions et de la consommation alimentaire. L'étude est publiée dans le British Journal of Health Psychology.

Un total de 281 jeunes adultes (avec un âge moyen de 20 ans) ont complété un journal alimentaire sur Internet  pendant 21 jours consécutifs. Les participants ont également rempli un questionnaire donnant des détails sur leur âge, leur sexe, leur ethnie, leur poids et leur taille. Ceux avec un trouble de l'alimentation ont été exclus. Tous les soirs les participants indiquaient comment ils se sentaient en utilisant neuf adjectifs positifs ou neuf adjectifs négatifs. Les participants ont été invités à indiquer le nombre de portions consommées de fruits (sauf jus de fruits et fruits secs), les légumes (sauf les jus de fruits), et plusieurs catégories d'aliments malsains comme les biscuits / biscuits, chips et gâteaux / muffins. Les résultats ont montré une forte relation entre l'humeur (positive) et la consommation de fruits et de légumes, mais de relation avec la consommation des autres aliments.

«Les jours où les gens mangeaient plus de fruits et légumes, ils ont déclaré se sentir plus calme, plus heureux et plus énergiques que d'habitude", a déclaré le Dr Conner.

Pour tenter de comprendre s'il existe une mécanisme de cause et affet, le Dr Conner et son équipe effectué des analyses supplémentaires. Elle a constaté que la consommation de fruits et légumes prédit l'amélioration de l'humeur positive le lendemain, ce qui suggère que les aliments sains peuvent améliorer l'humeur. Ces conclusions sont indépendante de l'IMC des individus.

"Après une analyse approfondie, nous avons démontré que les jeunes ont besoin de consommer environ sept à huit portions totales de fruits et légumes par jour afin de remarquer un changement positif significatif. (Une portion de fruits ou de légumes est d'environ une demi-tasse)."  explique le Dr Conner.

Elle ajoute que, bien que cette recherche montre un lien prometteur entre des aliments sains et des ambiances saines, des recherches supplémentaires sont nécessaires et les auteurs recommandent le développement d'essais contrôlés randomisés évaluant l'influence de la forte teneur en fruits et légumes sur l'humeur et le bien-être. 

Pour plus d'informations, sur cette étude contactez:

Dr Conner Tamlin
Département de psychologie de l'Université d'Otago
Tel 03 479 7624
Mob 021 984 332
E-mail tconner@psy.otago.ac.nz

dimanche 27 janvier 2013

Les mots du plaisir gourmand : croustillant

Les billets de la série Les mots du plaisir gourmand ont pour vocation d'aiguiser nos sens en nous remémorant quelques mots qui décrivent les saveurs, les textures, etc. des produits alimentaires.


Le dictionnaire de l'Académie Française nous apprend :


CROUSTILLANT, -ANTE adj. XVIIIe siècle, au sens de « plaisant ». Participe présent de croustiller. Qui croque sous la dent comme une croûte bien cuite. Du pain croustillant. Des beignets croustillants. Fig. et fam. Léger, piquant, un peu licencieux. Une anecdote croustillante. Un récit émaillé de détails croustillants.

CROUSTILLER v. intr. XVIIe siècle. Emprunté du provençal croustilha, « croustiller », dérivé de crousta, « croûte ».


Croustillant aux Framboises
Cependant cet adjectif est devenu un nom de préparation culinaire : les croustillants au chocolat sont des gâteaux ; il existe plusieurs recettes substantiellement différentes de ce gâteau (il s'agit probablement d'une forme réduite de la forme des gâteaux croustillants au chocolat).

Tuile croustillante au fromage et sésame



Si on en croit le nombre des astuces proposées sur internet pour rendre plus croustillante une préparation alimentaire (bacon, frites, pain, chips, fromage, fritures, beignets, etc.), le croustillant est bien apprécié à la condition de ne pas être trop dur. Il doit être léger, éthéré, aérien... sinon on bascule dans le croquant. Et là, c'est une autre affaire! Le croustillant s'apprécie aussi bien en bouche qu'avec l'oreille.  

Les sens de l'adjectif croustillant dépassent aujourd'hui l'univers de la gastronomie...  






jeudi 24 janvier 2013

Nutella....bientôt une victime collatérale ?

Sur le marché anglais, le miel et les pâtes à tartiner se partage un marché d'environ 150 millions de livres sterling. Le miel de Rowse est en première position devant, respectivement, la Marmite d'Unilever et Hartley's de Hain Celestial et Nutella de Ferrero.

L'ASA (Advertising Standards Authority) a indiqué à Rowse que son allégation « Slow Release Energy » était problématique parce qu'elle ne suivait pas les règles édictées par le législateur européen. La publicité incriminée ne peut donc plus être diffusée. Le miel est un aliment riche en fructose, lequel a un Indice Glycémique (IG) plus intéressant que celui du sucre. En fait l'IG du miel semble très variable entre les miels. Il est entre 30 et 80. L'IG est un indicateur de la rapidité avec laquelle les sucres contenus dans un aliment apparaissent dans le sang. La référence est de 100 pour le glucose (le plus rapide). On préférera des aliments dont l'IG est faible. Ils délivrent l'énergie qu'ils contiennent de manière plus lente et donc pour une même quantité d'énergie sur une plus longue période. C'est par exemple pour cette raison que l'on conseille aux coureurs de fond de manger des pâtes. Les nutritionnistes nous disent que les « sucres lents » posent moins de problèmes chez des personnes dont la fonction de régulation des sucres est perturbée (prédiabète).

La critique de l'agence porte essentiellement sur l'absence d'évidence spécifique. Si le miel est riche en fructose et si le législateur européen accepte l'allégation selon laquelle les aliments sucrés riches en fructose ont un indice glycémique faible (« sucre lent »), il reste cependant à s'assurer que le miel de Rowse possède un IG satisfaisant et aussi à en informer le consommateur. 

Shane Starling (de Nutraingredients.com) a recueilli les commentaires d'un des dirigeants de Rowse à l'annonce de la sanction de l'ASA. Celui-ci a indiqué être surpris que l'ASA ne sanctionne pas aussi les publicités de Nutella qui implicitement suggère que ce produit apporte l'énergie nécessaire aux activités des enfants tout au long de la journée. Deux poids, deux mesures ? 

Rien n'est pire qu'une agence régulatrice explicitement accusée d'une forme d'iniquité ! On peut parier qu'elle ne manquera pas à agir pour démontrer en la matière son impartialité. Une affaire qui risque d'affecter, là-bas, mais ici aussi, l'image de Nutella. Que l'ASA retoque la publicité de Nutella et l'on se demandera ce que font les pouvoirs publics français ? Et....          

GIVE, Faites savoir votre différence responsable !


On connaissait le bouton Like the Facebook.  Bienvenue à son petit frère : le bouton GIVE de ZeGive.  En ajoutant le bouton GIVE à votre site e-commerce, vous proposez à vos clients d’associer à leur achat un acte de solidarité !

Sur votre site de e-commerce, une fois le paiement effectué, vos clients sont invités à arrondir le montant de son achat au profit d'un projet d'intérêt général. Mes travaux sur le CRM (cause related marketing) suggèrent que donner la possibilité aux clients de faire un geste généreux par l'intermédiaire d'une marque est souvent un plus pour la marque et l'entreprise.

Le CRM a débuté il y a plus d'un siècle en Grande Bretagne lorsque pour l'achat d'une barre de savon Sunlight de Lever Brother reversait une partie du montant de l'achat pour le secours en mer.

Le bouton GIVE étend cette opportunité aux transactions sur internet ou sur mobile. L'entreprise ZeGive offre également d'autres opportunités intéressantes pour les entreprises, par exemple pour donner vie aux projets solidaires des collaborateurs.

lundi 21 janvier 2013

PsychoFood 2 : Monsieur le Juge, mon client a des circonstances...

Dans ce billet, je fais suite au premier billet de la série PsychoFood. Dans un premier billet, je présentais les travaux d'Alexander Chernev sur un biais d'estimation des calories (Dieter's Paradox) dont nous sommes tous susceptibles d'être victime. Une manière d'explorer l'alimentation, de la fourche à la fourchette, c'est de s'interroger sur la relation entre psychologie et alimentation . J'ai l'intuition qu'il y là de belles découvertes à partager. Ce second billet de la série met en relation le régime alimentaire et le comportement agressif.

Depuis de nombreuses années, les chercheurs se sont posé la question de l'origine de l'agressivité, de la criminalité, etc. Toutes les disciplines se sont attachées à apporter des réponses à ces questions. C'est aussi le cas de la nutrition !

Ainsi Béatrice Golomb, professeur de médecine à l'U.C. San Diègo, s'est demandé quels rôles pourraient jouer les acides gras trans sur le comportement. Le terme trans et le terme cis caractérise les deux formes géométriques qu'un même acide gras peut prendre dans l'espace. Les trans sont plutôt rectilignes alors que les cis sont plutôt courbés. Cette forme leur confère des propriétés, par exemple physique : la température de fusion des trans est plus élevé que celle des cis. On sait par ailleurs, les effets que les acides gras trans peuvent avoir sur la bonne santé cardiaque et vasculaire.

Béatrice Golomb a tenté de mettre en relation la consommation d'acides gras trans avec le comportement chez plus de 1 000 personnes. Des recherches avaient déjà montré que la synthèse dans le corps du DHA, une molécule avec un effet calmant et antidépressant, était perturbée par les acides gras trans. Les personnes qui ont participé à l'étude Béatrice Golomb ont, d'un côté, été interrogées sur leur alimentation et, d'un autre côté, les chercheurs ont apprécié leur degré d'impatience, leur irritabilité, leur agressivité, etc.

Après avoir considéré d'autres facteurs, les chercheurs de l'équipe de B. Golomb ont abouti à la conclusion que la consommation des acides gras trans est, probablement, l'un des meilleurs déterminants de l'agressivité. Ce lien est constant quelque soit l'âge, le sexe, l'ethnie ou les caractéristiques socio-économiques.

Est-ce qu'il existe une relation de cause à effet ? L'étude ne répond pas à cette question. Une personne naturellement agressive pourrait possiblement avoir un comportement alimentaire particulier. Bien qu'à mon avis cette hypothèse soit difficilement envisageable. Quoique ?

Sommes-nous ce que nous mangeons ? Cette étude semble corroborer, au moins partiellement ce dicton. Demain, peut-être, entendrons-nous dans les prétoires un avocat demander les circonstances atténuantes parce qu'alimentation de son client est trop riche en acide gras trans... et de demander également des dommages aux entreprises agro-alimentaires dont les produits, consommés par son client, sont riches en trans.

Une affaire à suivre !


Dans la série PsychoFood, lire et relire

      

        

vendredi 18 janvier 2013

Bières et mets : à la recherche des accords parfaits ?

Pour un français, cela pourrait sembler une hérésie tant notre culture gastronomique privilégie les accords entre les vins et les mets. Aux Etats-Unis, plus particulièrement dans la région de San Francisco, c'est l'accord entre la bière et les plats que l'on explore.

L'histoire semble avoir commencé en 2007 lorsque The Monk's Kettle a ouvert ses portes dans le centre San Francisco. Le nom fait référence aux moines trappistes réputés pour leur production de bières. La carte des bières est large avec plus de 180 produits dont certains sont millésimés et d'origine belge. La cuisine est, elle par contre, typiquement américaine.


Plus récemment, The Abbot's cellar a ouvert ses portes également dans le Mission District de San Francisco sur la base d'un concept similaire d'association idéale entre les mets et les bières. Ce restaurant haut de gamme donne aussi une place importante aux produits frais de saison et à la cuisine californienne.

Un concept intéressant que les brasseurs et des restaurateurs français pourraient proposer aux gastronomes français. 

jeudi 17 janvier 2013

J - 7 pour les XIX entretiens de la Rue d'Athènes (SAF)

Dans son Cycle de réflexion 2012-2013 : « Dans des territoires en mouvement : quelles cartes à jouer pour les entreprises agricoles ? » la Société des Agriculteurs de France, vous invite aux XIXe entretiens de la Rue d’Athènes sur le thème :


Les industries agroalimentaires, moteurs des territoires

L’agroalimentaire, sujet territorial à part entière

Le Jeudi 24 janvier 2013
8h45 - 17h00
SAF-agriculteurs de France
Amphithéâtre Bourgogne-H. Morize 
8 rue d’Athènes - 75009 Paris

Stéphane LE FOLL, ministre de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt clôturera cette journée

Consultez le programme ou Téléchargez le coupon-réponse

Renseignements complémentaires : saf@saf.asso.fr


lundi 14 janvier 2013

CES 2013 : des idées pour l'agro-alimentaire?

L'édition 2013 du Consummer Electronic Show (CES) de Las Vegas nous offre une belle palette de produits pour la santé. L'émergence du digital dans l'univers des entreprises agroalimentaires et de la distribution n'est pas récente. C'est aussi le cas dans nos vies. Aujourd'hui on peut par l'intermédiaire de son smartphone passer commande en scannant la photo de produits dans les couloirs du métro de Séoul ou le hall d'une gare française. 

Il y a quelques jours j'évoquais la multiplication de l'offre de podomètres, ces petits appareils qui nous permettent de contrôler le nombre des pas réalisés dans une journée et, indirectement, notre dépense énergétique. Plus récemment encore, c'est la fourchette intelligente que je présentais. Elle permet aussi de mieux contrôler la vitesse à laquelle on mange. Il existe, parait-il, un lien entre cette vitesse et notre santé. Cette fourchette a été présentée au CES 2013.

J'ai identifié plus de 250 entreprises présentes au CES 2013 dans le domaine de la santé et du fitness. Certains des produits présentés ne sont pas en relation directe avec la santé par l'alimentation, mais ils signalent l'importance que l'électronique prend aujourd'hui dans nos vies. On y découvrira, par exemple, des systèmes de sécurité pour les personnes âgées dont l'esprit est défaillant. Ils permettent à leur famille de les géolocaliser en permanence et de recevoir une alerte si la personne sort d'un périmètre prédéterminé.


L'offre de BodyMedia, entre autres, permet à chacun un système de monitoring de ses activités, de son sommeil ou de ses dépenses caloriques. C'est jusqu'à 5 000 données par minutes qui sont capturées et dont le système rend ensuite compte par l'intermédiaire d'une interface avec un ordinateur, une tablette ou un téléphone portable. On peut dire qu'il s'agit là de l'entrée en force des capteurs dans nos vies. Alors que des sociétés déjà bien connues, comme Masino, s'adressent à des professionnels de la santé depuis fort longtemps, les capteurs se démocratisent. Continua health alliance assure la continuité entre les systèmes d'enregistrement et les professionnels de santé. Ainsi, un médecin pourra contrôler à distance, par l'intermédiaire des produits de Continua, la respiration, la glycémie ou la qualité du sommeil de ses patients. Des systèmes experts lui permettront de détecter les écarts par rapport aux valeurs idéales de ces paramètres et suggérer une prise en charge adaptée. On peut imaginer que dans quelques années nous serons tous équipés d'un système personnel de capteurs en relation avec une équipe de praticiens.

Voir une vidéo sur les quelques produits du domaine de la santé qui sont présentés au CES 2013.



On découvrira également des systèmes permettant d'accompagner les clients dans des magasins dans le magasin ou à distance. Il s'agit d'un petit robot qui permet à un iPad de se déplacer dans un magasin. Voir la vidéo ci-dessous.
  



  

vendredi 11 janvier 2013

La fourchette électronique pour mieux manger !

Manger trop vite, ce n'est pas bon pour la santé...D'après les experts de SlowControl, manger trop vite est susceptible d'affecter négativement notre santé. Vous trouverez sur le site de cette entreprise française des sections mettant en relation la vitesse à laquelle on mange et 1. le surpoids, 2. le syndrome métabolique, 3. la glycémie et le diabète 3. l'apport énergétique et 4. la physiologie de la digestion et sur le tube digestif.

Manger moins vite consiste, dans un premier temps, à enregistrer la vitesse de ses coups de fourchette, puis dans un second temps à programmer un objectif de rythme qu'il n'est pas préférable de dépasser. La fourchette électronique permet d'enregistrer le rythme naturel du mangeur, de programmer le rythme idéal et de s'assurer que l'on respecte cette limite. La fourchette émet un son et change de couleur pour alerter des écarts ou pour battre le rythme.

Visiblement, le produit cible pour l'instant les citoyens américains (le site de l'entreprise est en anglais) ou plus généralement anglophones.

Slowcontrol est une entreprise française implantée dans la Technopole Cap'tronic de la Réunion. Elle a bénéficié du soutien d'Oséo. La fourchette est présentée actuellement au très fameux Consumer Electronique Show (CES) de Las Vegas.

jeudi 10 janvier 2013

Changement climatique : quelques pistes pour en atténuer les effets sur la production agricole !

L'article du Financial Times du 3 janvier sur l'estimation des coûts associés au changement climatique de Louise Lucas m'a particulièrement interpellé.

D'après la Nationale Farmers' Union, c'est une perte de plus de 1.3 milliard de livres sterling (1,5 milliard d'€) que les évènements extrêmes, imputables au changement climatique, ont causé à l'agriculture anglaise. Ainsi, le rendement du blé a été de 15 % plus faible que celui de la moyenne des cinq dernières années ; celui de la pomme de terre a été égal à 75 % de celui de l'année 2011 et le plus bas depuis 1976. La Grande-Bretagne est devenue un importateur net de blé, un évènement rare depuis de nombreuses années.

Alors que l'on discute les contours d'une nouvelle politique agriculture commune, il me parait judicieux de suggérer à nos représentants de favoriser la mise en oeuvre de dispositifs permettant d'atténuer les effets du changement climatique sur la production agricole. Rappelons que le changement climatique est caractérisé par une évolution lente des moyennes (par exemple une augmentation de la température moyenne), mais surtout par un accroissement de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes (lire mon billet à ce sujet).




Il existe plusieurs moyens pour atténuer les effets du changement climatique. Alors qu'il est difficile d'envisager de changer le climat dans le court terme, c'est contre ses effets qu'il faut se protéger.

La première démarche consiste à favoriser une agriculture moins sensible au climat. Pour certaines productions, une migration vers une agriculture en environnement totalement (ou partiellement) contrôlé peut être envisagée. Mais ce n'est pas le cas pour les grandes cultures que l'on ne peut mettre sous serre qu'avec un coût exorbitant (sauf à inventer de nouvelles technologies ou bien démultiplier la productivité). Pour celle-ci, l’hétérospécificité des choix culturaux peut offrir une possibilité d'assurance contre des pertes de production importantes.

L'hétérospécificité des choix culturaux est une démarche qui consiste à optimiser les choix des cultures et des variétés compte tenu de la typologie des sols et de l'anticipation que l'on forme sur la distribution des évènements climatiques dans une région. Il n'y a là rien de nouveau. Mais alors que l'optimisation est habituellement réalisée pour obtenir le rendement moyen (que l'on prend seul en considération) le plus élevé pour une exploitation. Lorsque le risque est d'amplitude et de fréquence faibles, on peut faire abstraction de sa variation. Mais lorsque le risque est important en amplitude et en fréquence, on ne peut plus ne pas le prendre en compte. La démarche habituelle est altérée sur deux aspects :
  1. En premier lieu, on prend en compte le rendement moyen ET sa variation imputable au changement climatique. La technique mise en oeuvre ici n'est substantiellement pas différente de l'approche proposée par Harry Markowitz, prix Nobel d'économie en 1990, pour la gestion des portefeuilles financiers composés de produits financiers.
  2. En second lieu, le modèle prend en compte l'intérêt de l'association entre des agriculteurs exposer de manière différente au risque climatique. La nature de la différence d'exposition est ici un critère important pour le succès de la mitigation des risques.
Comme cette technique n'est pas encore déployée, il est difficile d'obtenir des données de terrain. Cependant, le recours à des simulations souligne l'intérêt de l'hétérospécificité des choix culturaux. Pour en savoir plus sur cette technique lire un article sur ce sujet (suivre ce lien).

L'agroforestry, association entre les cultures agricoles et la production de bois, présente également des pistes intéressantes d'atténuation des effets climatiques.

Finalement, on peut toujours suggérer de compenser les pertes imputables aux évènements extrêmes. Cette solution apparaît la plus facile à mettre en oeuvre, mais elle présente quelques problèmes. Il est concevable de mettre en oeuvre une politique s'il y a redistribution entre la production et la consommation. Les politiques agricoles qui favorisent la production permettent aux consommateurs de bénéficier de prix bas. Il s'agit d'un gain pour le consommateur. Il n'apparaît pas injuste de récompenser l'agriculture sous la forme de subvention.

Dans le cas de pertes de production imputables au changement climatique, le prix à la consommation augmente. Le consommateur comme l'agriculteur sont pénalisés. Les gains de l'un ne peuvent compenser le manque à gagner de l'autre, puis les effets sont négatifs sur les uns comme sur les autres.

mercredi 9 janvier 2013

MS MIA de l'ESSEC sur Campus - Chanel

Retrouvez la vidéo de présentation du MS Management International Agroalimentaire de l'ESSEC sur Campus - Chanel.


Avec Frédéric Oble, directeur pédagogique du MS 
et Khaled KORTAS, Diplômé du MS MIA (2011).
Khaled travaille chez Pernod Ricard en Suède dans le Marketing.

lundi 7 janvier 2013

Fromages au lait cru ou fromages au lait pasteurisé, lesquels choisir ?


Il s'agit d'une histoire déjà ancienne, mais qui à mon avis est toujours d'actualité. Aujourd'hui, elle s'incarne dans le débat sur les pilules contraceptives de troisième génération. Demain, elle s'incarnera possiblement dans une autre problématique alimentaire ou agricole. Voici l'histoire.

Un matin de janvier 2008, sur les ondes d’une radio nationale bien connue, un journaliste évoque la censure dont l’un de ses reportages de télévision a récemment été victime. Selon lui, sous les pressions des dirigeants d’une grande entreprise fromagère française, son plaidoyer pour les fromages au lait cru a été partiellement occulté. Après nous avoir rappelé que les dirigeants de cette société sont d’ardents partisans des fromages au lait pasteurisé, et cela essentiellement pour des raisons de sécurité alimentaire – c’est-à-dire en raison des moindres risques sanitaires qu’ils sont susceptibles de faire courir aux consommateurs –, il nous présente l’argument clef en faveur des fromages au lait cru, celui qui a été censuré : si l’on considère la contamination par les listérias, deux tiers des fromages contaminés sont des fromages au lait pasteurisé. Uniquement un tiers des fromages contaminés par des listérias sont des fromages au lait cru.

D’après le journaliste, il s’agit là de l’argument-choc que sa rédaction, soumise aux pressions d’un grand groupe laitier, a censuré.

En faisant abstraction du contexte, l’élément clef est :

Il y a deux fois plus de fromages pasteurisés contaminés par les listérias que de fromages au lait cru contaminés par les listérias.

Autrement dit, si un nombre, par exemple 100, de fromages au lait cru contiennent des listérias, alors 200 fromages au lait pasteurisé contiennent des listérias.

Cela nous donne l’impression que l’on court un risque deux fois plus important de consommer un fromage contaminé par des listérias en consommant un fromage au lait pasteurisé que si l’on consomme un fromage au lait cru.

Pour nous forger une opinion peut-on faire abstraction du contexte de l’énoncé : un journaliste dont une partie du reportage a été coupée ? Bien évidemment non ! Cette précieuse information, nous dit-il, a été censurée à la demande d’un grand groupe alimentaire favorable aux fromages au lait pasteurisé. On veut donc nous cacher la vérité ! On cherche à nous influencer ! Mais les ardents défenseurs de l’information sont là pour nous prémunir contre ce complot du silence. A priori, notre opinion est faite ; nul besoin d’aller plus loin. Vive les fromages au lait cru !

Considérons que le danger associé à un fromage contaminé par une listéria est grave et plaçons-nous dans la peau d'un consommateur qui doit faire un choix entre acheter des fromages au lait cru et des fromages au lait pasteurisé. La question pertinente est alors de savoir lequel des deux types de consommation est le plus risqué. Est-il plus risqué de consommer des fromages au lait pasteurisé que de consommer des fromages au lait cru ?

Mais ici nous ne disposons pas de toutes les informations nécessaires pour nous forger une décision. Nous devons faire quatre hypothèses.

  • Première hypothèse : supposons que les fromages analysés par un laboratoire de contrôle soient en proportion de ceux commercialisés. Prenons une valeur hypothétique : un fromage est analysé pour 1000 fromages commercialisés.
  • Seconde hypothèse : supposons que ce taux d’échantillonnage soit équivalent entre les deux types de fromages.
  • Troisième hypothèse : supposons que les fromages commercialisés soient dans une proportion de p. Par exemple, 9/10 des fromages commercialisés sont des fromages au lait pasteurisé.
  • Quatrième hypothèse : supposons que l'on détecte des listérias dans x % fromages au lait pasteurisé, par exemple dans 2 sur 10 000.

Avec une proportion de 9/10.

Si 10.000 fromages sont analysés
· 1000 fromages au lait cru sont donc analysés
· 9000 fromages au lait pasteurisé sont donc analysés
Si sur ces 10.000 fromages analysés
  • 3 contiennent des listérias
    • 2 fromages au lait pasteurisé
    • 1 fromage au lait cru
L’énoncé est vérifié, il y a deux fois plus de fromages contaminés au lait pasteurisé que de fromages contaminés au lait cru.
Mais on observe que 2 fromages au lait pasteurisé sur 9000 sont contaminés et que 1 fromage au lait cru sur 1000 est contaminé.

Autrement dit, on a 4,5 fois plus de chance – ici de malchance -- en consommant un fromage au lait cru de tomber sur un fromage contaminé par les listérias que si l’on consomme un fromage au lait pasteurisé. Comme le taux d'échantillonnage est le même pour les deux types de fromages (hypothèse 2), alors le risque relatif est similaire entre les fromages analysés et les fromages commercialisés.

Le calcul est le suivant.
R(P) = 2 /9000 est le taux de contamination des fromages au lait pasteurisé analysés. R(C) = 1/1000 est le taux équivalent pour les fromages au lait cru.
Donc : R(C) / R(P) = 9/2.

Avec une proportion de 9,99 /10.

Si sur 10.000 fromages analysés
  • 10 sont des fromages au lait cru
  • 9 990 sont des fromages au lait pasteurisé
Si sur ces 10.000 fromages analysés
  • 3 contiennent des listérias
    • 2 fromages au lait pasteurisés
    • 1 fromage au lait cru
Dans ce cas-là, on court un risque de plus de 4000 fois plus important de tomber sur un fromage contaminé si l’on consomme un fromage au lait cru que si l’on consomme un fromage au lait pasteurisé !

Les données présentées par le journaliste n'étaient point erronées. Elles étaient même très certainement justes. Cependant, à l'évidence elles étaient trompeuses puisqu'elles donnaient une impression différentes des risques relatifs réels. Celui-ci, comme nous venons de le montrer, dépend également de la proportion des fromages au lait pasteurisé et des fromages au lait cru. L'information proposée par le journaliste était juste, mais incomplète. Cette proportion était omise. Ainsi, le consommateur n'était pas en mesure de se forger une opinion en toute connaissance de cause.

La censure était-elle fondée ? Je vous laisse juge. Personnellement, je pense qu'il y a mieux à faire. C'est ce que j'ai essayé de faire dans ce billet. Faire la part des choses.

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